Embarquement imminent (mon année à Serial Eyes)
J’atterrirais à Berlin dans exactement 10 jours. Serial Eyes commence le lundi 16 septembre. C’est encore, pour moi, une réalité très virtuelle. Mais je viens de faire le virement du montant de la formation. J’ai réservé mon billet d’avion, imprimé mon boarding pass. La réalité concrète de ce futur proche s'impose petit à petit. Hier soir, alors que je faisais je ne sais quoi, l’idée m’a traversée l’esprit. Dans quelques jours, je serais dans une ville étrangère, pour apprendre à perfectionner mon écriture scénaristique. Et l’une des personnes en charge de m’enseigner des choses sera Frank Spotnitz. Je me suis mis à rire. Sincèrement : rire, comme ça, bêtement, tout seul chez moi. C’est que je ne peux pas m’empêcher de regarder en arrière. Je repense à l’ado que j’étais, à l’importance qu’avait pour moi la télévision et les séries que je regardais, autant par amour de la fiction que parce que c’était une fenêtre vers un ailleurs possible. Un ailleurs qui était encore très virtuel. Comme hors de portée. Ce que j’écrivais allait dans des classeurs qui allaient dans des placards, et c’est tout. Un de ces jours où on vous demande ce que vous ferez plus tard, j’étais en cinquième, un professeur avait accueilli ma réponse, sans doute peu convaincue, avec un certain scepticisme et m’avait renvoyé : ‘‘tu ne voudrais pas faire écrivain ?’’ J’avais haussé les épaules, et répondu quelque chose de l’ordre de : ‘‘ce n’est pas un métier’’. Je n’osais pas croire que quelque chose de cet ordre soit possible. A ce moment-là, et pour pas mal d’années encore, l’idée de la déception était trop dure à supporter. C’est précisément à cette époque que mon histoire avec The X-Files a commencé. Je repense aux épisodes religieusement enregistrés sur M6, aux articles de presse soigneusement collectionnés. C’est ma série. Celle avec qui j’ai grandi. J’avais 14 ans quand le premier épisode est passé, un dimanche de juin sur M6. J'étais devant l'écran. J’en avais 22 quand j’ai vu le dernier épisode, au lendemain de sa diffusion aux Etats-Unis (la révolution Internet était passée par là). La série de vos 15 ans est la série de votre vie. Je vais pouvoir profiter de l’expérience de l’un de ceux qui a fait X-Files, l’un de ses principaux auteurs, mais aussi de pas mal d'autres professionnels renommés. Je ne peux rien faire d’autre que rire, parce qu’il faudra qu’il soit devant moi pour que j’ai la certitude que c’est vrai.