Seulement 15 ans
Nous sommes le 17 mai 2005, et ce jour marque la première journée mondiale de lutte contre l'homophobie.
Il est facile de s'abriter derrière les progrès pour croire ou laisser entendre que l'homophobie n'existe plus aujourd'hui. Il est facile de prétendre que les agressions recensées sont le fait exceptionnel d'une minorité qu'on prétend en voie d'extinction.
Il est facile d'avancer les yeux fermés sans regarder pour, surtout, ne pas voir.
Ne pas voir les agressions non répertoriées, car jamais avouées par leurs victimes. Ne pas voir les insultes proférées quotidiennement si vous refusez de faire le choix de cacher qui vous êtes. Ne pas voir les invitations au replis, à la dissimulation, à l'invisibilisation. Ne pas voir la pression exercée par une société hétérosexiste qui ne saurait admettre l'éventualité de l'existance d'une différence, alors quand à la "tolérer"...
Ne pas voir que les jeunes homosexuels font 6 à 13 fois plus de tentative de suicide que leurs copines et copains hétéros. (Pardonnez la vagueté du chiffre, l'unique étude Française sur le sujet n'a pas encore livré ses résultats complet : c'est un effort constant, de ne pas voir).
Ne pas voir que les jeunes gays sont en première ligne des reprises des contaminations par le VIH. On dit qu'après 20 ans, le discours de prévention ne parvient plus à passer, que le message serait usé. Si on se trompait seulement de message, d'arme à user?
Ne pas voir leur usage de drogue, leurs mises en danger quotidiennes...
L'homophobie est plus sournoise. Elle n'est certainement pas moins violente.
La date du 17 mai n'a pas été choisie par hasard. Ce jour-là, il y a 15 ans, l'OMS supprimait l'homosexualité de la liste des maladies mentales. Seulement 15 ans, déjà 15 ans. Une éternité de luttes et de combats difficiles, de victoires arrachées à force d'acharnement, à la mémoire de ceux qui sont tombés dans la bataille. Une éternité si récente.
Le paradoxe effarant d'une société qui évolue à une vitesse furieuse, mais seulement pour mieux ne rien changer.