Y a-t-il un scandale des signatures?
La chasse aux 500 signatures, ses candidats à la candidature plaintifs qui confessent leurs difficultés à la télé la larme à l’œil et ses polémiques vaines sur la pluralité démocratique, sont devenus un marronnier de l'élection présidentielle. Ce débat me semble aller crescendo, 21 avril 2002 et blâme de Jospin attribué à Chevènement aidant ; il atteint son paroxysme cette année, allant jusqu'à installer l'idée qu'une réforme est nécessaire.
Il me semble au contraire que le système se régule très bien lui-même, et que les difficultés de certains aspirants candidats sont celles qu'ils se sont eux-mêmes créées.
Il n'y a qu'un bémol à cette affirmation : le cas Le Pen dont je ne sais trop que penser. D'un coté il semble peu concevable que quelqu'un qui attire les votes de 15 à 20% des gens ne soit pas candidat, de l'autre cela lui arrive parce que les 80 à 85% restant sont déterminés à lui faire barrage... Mais pour le reste, pas d'état d'âme. On a assez donné aux candidatures de témoignage et à la confusion entre Présidentielles et Législatives.
Avoir 15 ou 20 candidats à la Présidentielle pose un problème bien plus embêtant que si cela ne servait simplement à rien : cela embrouille le débat, décourage les électeurs qui ne s'y retrouvent plus trop, créé donc de l'abstention, du désengagement. Et, en fin de compte, cela nuit au pluralisme plutôt que de le servir. En effet, aussi longtemps qu'il y aura autant de candidats à la présidentielle, et autant parmi eux qui n'ont rien à y faire, il sera impossible d'envisager une réforme de l'accès aux médias qui rendent les choses plus équitables.
Prenons quelques exemples : quel intérêt d'avoir deux (voire trois) candidats Trotskistes ? Trois candidats qui se réclament de la même mouvance alter-mondialiste et défendent le même programme ? Quelles différences fondamentales réelles entre un Villiers, un Dupont-Aignan et un Le Pen ?
Dans tous les cas, l'élément clivant est l'égo des personnes impliqués, qui les pousse à se sentir indispensables.
Bien sur, pour le pluralisme, ce serait un peu dommage que ni Besancenot ni Bové ne puissent se présenter, par exemple, laissant la place à une Laguillier hystérico-sectaire et à une Buffet qui a pris les comités à la Stalinienne, et qui ont toutes deux bénéficié de la prime aux sortants, aux réseaux, et à l'ancienneté. Mais si cela devait arriver, cela ne ferait que permettre de créer les conditions suffisantes, la pression suffisante, pour que dans cinq ans, ces messieurs-dames laissent leurs égos à la porte des salles de négociations et parviennent à dégager des candidatures communes.
Autant une candidature anti-libérale unique aurait eu à la fois de la gueule et de l'influence, autant la ligne de départ qu'on nous propose aujourd'hui en alternative au PS, à savoir Laguillier-Besancenot-Buffet-Bové-Voynet est à la fois ridicule et contre-productive -- il suffit pour s'en rendre contre de consulter les chiffres anémiques des intentions de vote pour ces candidats. Et c'est bien la même chose à droite avec les trois compères cités plus haut, auquel on peut heureusement décompter cette année C. Boutin.
En cela, j'en arrive à penser que la crise 2007 des candidatures, si elle pouvait aboutir à la disqualification d'un "gros - petit candidat", pourrait s'avérer salutaire. A condition qu'on ne réforme pas le système au moment même où il commence à porter ses fruits...